Montagn'Hard

Préambule :

6 semaines après le GR73 et ses 73km avec 5200md+, la Montagn’Hard se présente à moi, j’ai bouffé du dénivelé entre temps (16000m sur 3 semaines) avant 2 semaines d’affutage. L’affutage commencera par une gastro durant 4 jours avec fièvre et vertiges, les grosses chaleurs finiront le travail. La dernière semaine commence avec une certaine fatigue et la confiance pointe le bout de son nez la veille de la course, avant je doute toujours, le charme de l’ultra, impossible de savoir à l’avance si on fini ou pas…

Le vendredi (J-1) après avoir préparé la bouffe et matos, on prend la route direction St Nicolas de Véroce, 18h15 je récupère mon dossard en 3min et 10min après on est dans notre chambre d’hôtel, bien content d’être au sec, dehors c’est le déluge, demain il fera beau, tous les voyants sont au vert, je suis même détendu mais bon dès que j’égare un truc c’est panique à bord, zen faut rester zen…

Couché vers 22h30 après avoir feuilleté des mag’ de surf (histoire de me projeter dans ma prochaine récup’ active).


Jour de la course : d’H-2 au départ

Réveil 3h00, je me demande si je peux dire que j’ai dormi, l’impression d’avoir été éveillé toute la nuit… Habillage + petit déj’ dans la salle de bain, puis direction le bas de l’hôtel, pour prendre la navette à 3h55, coup de chance que celle-ci ait été mise en place. Je rencontre un autre coureur Vincent, venu de Paris et ayant passé la nuit sous la tente, il a eu bien froid.

A 4h10 on est sur le site de la course à attendre dehors le départ et il fait vraiment froid, je cherche où déposer le sac que je récupérerai aux Tappes (63ème km).

L’heure avance doucement, après 2 cafés, il est temps de se faire badger pour rentrer dans le sas de départ, tout le monde est bien calme, certains ont la banane, d’autres ont le visage fermé, il y a des groupes et des coureurs seuls chacun se placent, moi après m’être isolé au fond je me mets au milieu peu avant le décompte, on doit être un peu moins de 200.

5h07, il fait nuit, temps frais, musique de départ histoire de bien vibrer ou flipper, le décompte et c’est le départ, ça bouchonne sous l’arche puis on peut enfin commencer la Montagn’Hard, ça va être long…


Départ – Les Toilles : 10km 814md+ (1h30)

Sur la première petite montée ça bouchonne encore, on est dans une prairie, je double en gardant le cardio sous les 80%, le problème c’est que l’herbe est humide et que d’entrée j’ai les pieds trempés. Ensuite on attaque (enfin on marche vite) sur un sentier en sous bois, je rencontre Fred on est à moins de 2km du départ, on échange quelques mots on a à peut près le même rythme et le feeling passe bien, cool me voilà avec un compagnon de course.

François Lachaux (3ème en 2011) m’avait dit pendant le repérage de garder un rythme qui permet de discuter, ben j’y suis !

La descente à Bionay se fait avec le frein à main, je vais tacher de limiter la casse des fibres et amortir au max, il s’agit pas de faire des bons ou de descendre à fond de cale, ce que font quelques coureurs, ce qui nous fait sourire avec Fred, en tout cas on a pas les jambes pour aller comme ça sur plus de 100km.

De Bionay jusqu’au dessus de Montivon on grimpe 530md+ à bonne allure, on discute et je recroise Vincent toujours sans bâton, il va bien.

Je connais bien cette partie de parcours et donne des indications à Fred sur la suite, on arrive au 1er ravito, il est 6h36 (27min d’avance), je peux enlever ma frontale, pointé 39ème, la suite sera plus difficile, le versant Mont Blanc est exigeant avec beaucoup de montées-descentes raides avec des racines, pierre et zones humides.


Les Toilles – Bionnassay : 10km 930md+ (1h50).

On repart du ravito (1147m), le plein est fait (sur cette 1ère partie je n’ai pas fini mon camel porté inutilement trop d’eau), ça commence par une partie roulante et montante qui se courre en grande partie jusqu’au Col de la Forclaz (1520m) ensuite c’est raide jusqu’au Priaron (1960m), j’ai les jambes et parts un peu devant les autres, je relance dès que possible et arrive au sommet du Priaron en ayant gardé mon avance (30min sur mon planing), je préviens Céline qui viendra me voir avec Tiago à Bionnassay.

Sur la descente à Bionnassay, j’y vais franchement cool, double quelques coureurs puis me fait rattrapé dans la descente plus raide en foret, Fred recolle et m’accompagne, je gère pour me préserver.

Arrivé à Bionnassay, il fait beau et un peu chaud, il est 8h27 (36min d’avance), 36ème je discute avec Céline et Tiago ça me fait du bien pour la suite, là encore j’ai porté trop d’eau. Fred repart devant et on se retrouve à la sortie du village, la vue est magnifique.


Bionnassay – refuges de Miage : 8km 875md+ (1h39)

Cette partie je ne l’a connais pas, c’est toujours aussi classe de passer près des glaciers du massif, la vue est vraiment sympa, on avance bien avec Fred après la passerelle de Bionnassay au dessus du torrent, on fini de monter le Col du Tricot perché à 2120m, je m’éloigne un peu devant (Fred est dans son passage à vide qu’il connaît bien). Les sensations sont bonnes et je rattrape quelques coureurs. Dans la descente toujours en amorti, j’arrive au ravito des Miages 600md- plus bas, l’accueil est bien sympa, quelques coureurs sont là on repart avec Fred et quelques autres.

Il est 10h06 (40min d’avance), je suis 27ème.


Refuges de Miage – Tré la Tête : 11km 1090md+ (2h13)

Dans la montée aux Chalets Trucs je prends un peu d’avance, notamment sur le 152.

Les sms de soutient affluent c’est excellent pour le moral, avec mon avance je suis optimiste sur la suite, Fred me rattrape une nouvelle fois dans la descente vers La Frasse, sa famille l’attend. Céline m’envoi un sms, elle fait une pause avec Tiago à l’hôtel, la journée va être très longue pour eux aussi. Tous les voyants sont au vert.

A partir de la Frasse (31km – 1300m), j’entame la partie repérée avec François Lachaux jusqu’aux Tappes. D’entrée le sentier en forêt est raide, Fred a retrouvé la forme, je rentre dans une phase de moins bien, on se relais jusqu’en haut de la Combe d’Armancette (1905m), la chaleur commence à faire mal, il y a un point d’eau à Tré la Tête. Après la combe le chemin redescend un peu, la forme revient et avec Fred on progresse avec facilité, rattrapant quelques coureurs.

Sous Tré la Tête ça remonte je prends une nouvelle fois de l’avance et arrive 21ème au ravito (1970m), 40km environ et 3700md+ de parcourus. Mon avance est de 41min. Il est 12h20, 7h13 de course. Il fait bien chaud, il me reste de l’eau je ne fais pas le plein, juste trempé la tête.


Tré la Tête (1960m) – Les Contamines (1180m): 7,7km de descente (01h04)

Fred me rejoint après le ravito pendant que j’envoi ou regarde mes sms, dans la descente bien technique (raide, racine, marche, zone humide sur dalle glissante) on rattrape un coureur (61) qui a un doute car il ne voit plus de balisage, je connais alors on trace à 3-4, puis le 61 me dépose dans la descente il a les jambes, je gère. Après la partie humide, je double un coureur qui boite, il me dit s’être déboité la hanche en tombant, il continue jusqu’aux Contamines.

Fred me double avec le 152 dans la partie « plate » qui rejoint les Contamines, 5km où une douleur intercostale me gène je ne peux pas dérouler et regarde le 1er du 60km (parti à 7h) me déposer, heureux de savoir qu’il est sur le 60km…

Grosse chaleur dans la vallée, 30min sans eau, aux Contamines, je retrouve Céline et Tiago, bien content de temporiser avec eux, manger des pâtes et refaire le plein pour attaquer la montée principale de la course, celle du Mont Joly. Je suis toujours 21ème et mon avance est de 43min, ça me laisse du temps pour le ravito et de la marge pour la suite, les voyants sont toujours au vert.


Les Contamines (1180m) – Mont Joly (2525m) : 7,7km 1500md+ (2h35)

On repart avec Fred, croise un coureur qui remonte au ravito après s’être planté d’itinéraire dans le village… après quelques centaines de mètre courable, on attaque le Mont Joly, Fred se sent moins bien, je l’encourage et essai de le tirer, mais il cale, je décide de poursuivre à mon rythme, dommage après 50km ça m’aurait plu de finir avec lui, ça aurait eu de la gueule.

Après une courte redescente, à 1700m je traverse les chalets de Porcherey, la vue sur le Mont Blanc est en grand panorama, un coureur me rattrape, je force un peu car le terrain est plus « plat », je pensais à un mec du 60km, mais il ne prend pas la bifurque et me suit sur le grand parcours.

le vent rafraichi les ardeurs alors je m’arrête pour mettre me couvrir, le mec me double en souriant et en me demandant si ça va, je le rassure. Son dossard est celui du 60km, mais comme je n’en suis pas sûr je le regarde filer devant en souriant à mon tour…

Malgré tout cette montée se fera plus lentement que prévu, je suis dans le dur vers 2000m, les messages de soutien à nouveau servent d’antidouleur… je ne lâche rien et continue.

J’ai en vue le 152 qui avance bien, ça me tire et je double le 61 qui s’est assis sur un rocher à 2300m.

Enfin au sommet, le 152 est là avec le 46 ils discutent et repartent dès qu’ils me voient, un vieux papy bien péchu et perché à 2525m me pointe à la 19ème place, il ne me reste plus que 3min d’avance et je n’ai plus de boisson… j’ai chaud et froid en même temps…(le thermostat corporel déraille).


Mont Joly (2525m) – Tappes (1440m) : 5,2km de descente (01h05)

La descente de 5,2km vers les Tappes (1440m) commence par la crête du Mont Joly, aérienne, je visualise le parcours jusqu’à l’aiguille Croche que je ferai du nuit entre le 101 et 105km…

Je gère toujours les descentes pour limiter la casse mais mes pieds commencent à me faire mal, ça me ralenti un peu plus, je sais que je ne tiendrai pas mon planing, mais combien temps ça va durer ? pas trop envie de compter…

Les deux (152 et 46) qui me précèdent attaquent fort, après le chrono sur la montée, il y a le chrono sur la descente, je ne tenterai aucun des 2, j’arrive aux Tappes 19ème après 12h de course et 63km (17min de retard).

1h30 sans boisson, je suis sec, Céline est montée avec Tiago en cabine, leur retour peut se faire jusqu’à 17h30, je profite de cette ½ heure, pour me changer (Céline me dit que j’ai des ampoules aux pieds), manger des pâtes, faire le plein, il fait chaud ici alors que j’ai eu froid en haut, ce ravito m’a fait du bien.


Tappes (1440m) – Le Bolchu (1975m) : 10,3km 1170md+ (02h36)

Après 30min d’arrêt, je repars 15min après le 46 et le 61 qui lui a fait plus court comme arrêt et surtout repart avec son pacer. Fred arrivera 1h après moi. Je ne reverrai plus le 152 (très en forme).

Je remets les compteurs à zéro sur le GPS, reste 50km et 3600md+, je branche le gps sur le chargeur, mets pour la 5ème fois ma bande son de 3h00…mais bon elle me convient, je ne m’en lasse pas.

Je revois Céline et Tiago 2km plus loin au Parking de ND de la Gorge (1210m), voilà maintenant je me dirige vers le col de la Fenêtre (2245m – 70km) pour entrer dans le Beaufortain, je connais aussi cette partie jusqu’à Annuit (85km).

J’envois et reçois les derniers sms de soutien avant longtemps car je vais découvrir que j’entre dans une zone non couverte du 65ème au 101ème km, c’est longuet… faut pas non plus avoir de pépins…

Pendant 2h je suis seul, j’ai un peu froid je mets ma veste et mon buff sur le cou (j’ai mal à la gorge), je me retourne souvent dans la forêt car j’entends des coureurs mais il n’y a personne…

Je commence à comprendre que ça va durer peut être 24h… ou plus.

Je reviens sous le Col à 5min de ceux qui me précèdent (46 et 61), le passage du Col à 2245m est une vraie bascule psychologique, car cela fait 70km et 6450md+ de parcourus, je vois le Mont Blanc une dernière fois, le soleil commence à se rapprocher de l’horizon, il me reste plus de 40km mais que 2400md+, va falloir gérer la nuit…

Au ravito du Bolchu (1975m), il est 20h10, je suis 18ème – 71km.


Le Bolchu (1975m) – La Commanderie (1747m) : 8,6km 460md+ (02h08)

Dans la tente du ravito, bon accueil, il fait chaud, 2 coureurs sont là, l’un d’eux ce sent pas au top et évoque l’abandon, l’autre le 46 qui s’était fait la malle au sommet du Mont Joly, me refait le même coup, il trace 2 min après mon arrivée, il a l’air moins frais, j’ai vu que je pouvais le rattraper en montée mais en descente il me distance rapidement.

Je refais le plein du camel (2 litres) plus un bidon de 500ml de soupe, j’ai faim, tant mieux autant remplir l’estomac avec du solide, faut que je tienne jusqu’à la Commanderie. Julien d’OST a dit à Céline qu’il fallait que je bouffe, alors tant que ça passe.

Je quitte le Bolchu en 17ème position avec en ligne de mire le 46 et je sais aussi que 61 est avec son pacer quelque part à 10min devant moi.

La montée du Col de Gitte (2385m) se fait aisément, je peux même relancer et fini par recoller aux 3 de devant. Le soleil se couche, c’est beau, un dernier regard sur la suite du programme, Col de Véry, Aiguille Croche et Mont Joly… la distance n’est pas spécialement rassurante, mais ça me semble gérable…

Sous le Col de la Gitte, je passe devant le 46 (il est fatigué et abandonnera à la Commanderie), c’est au Col que je passe devant le 61 et son Pacer qui s’habillent pour la nuit, moi avec ma veste je suis bien, je descends le mieux possible pour creuser l’écart.

Vers 22h00 sous le Lac Noir (2193m), je prend de l’avance car je n’ai pas encore utiliser la frontale, les autres râlent derrière, le terrain est piègeux, une traversée en dévers avec une végétation au niveau des épaules empêchent de voir les trous, les cailloux et les racines, j’y vais à bloc seul moyen de les distancer, dans la petite remontée je mets ma frontale sans m’arrêter et file à la Commanderie sans trainer, il fait nuit noire, la lune ne s’est pas encore levée, j’ai une nouvelle fois les pieds trempés par les zones humides traversées.

Au ravito de la Commanderie, il est 22h20, 14ème je me sents bien, 84km d’avaler, mon planing est explosé, mais peu importe, je veux finir cette course


La Commanderie – Le Monument : 18km 1315md+ (04h32)

Je refais le plein (une banane d’engloutie) et repart quand le 61 et son compagnon arrivent, prochain et dernier ravito 100km dans 18km. Fred a poursuivi jusqu’ici et a dû abandonner à cause d’une douleur au genou.

Céline et Tiago sont en bas quelque part vers les Granges, rien de mieux pour avancer.

Je les retrouve à 23h deux petits frontales dans la nuit qui m’appellent, enfin on se retrouve et ce sera la dernière fois avant l’arrivée, le 61 passent devant et je vois dans la nuit 2 autres concurrents, décidément même après 17h de course, ça reste une course…

Je repars bien fatigué mais motivé, je suis conscient que ce sera dur de faire moins de 24h, c’est aussi une partie que je ne connais pas, mis à part l’avoir visualisée, toute la montée jusqu’à l’Aiguille Croche m’est inconnue, on est au 85km à 1161m et je dois monter à 2487m au 101km.

Un second gel au café, m’en reste 3 pour tenir, Fabrice le coach avait raison ça aide à tenir un peu éveiller, je n’oublie pas de prendre régulièrement mes gels maison pour alimenter le cerveau en glucose,  histoire de rester lucide et que les commandes nerveuses puissent fonctionner.

Faut que je puisse rester suffisamment vigilant pour toujours voir les marques, ne pas m’user, manger, boire, lire l’altimètre et mon topo papier pour savoir ce qui me reste à faire…

Après Annuit et une montée sèche dans une prairie hyper raide et sans sentier, je rattrape le 61 et son pacer, on échange quelques mots et je devine sa motivation, on se tire la bourre depuis Tré la Tête soit près de 11h…

La monté au col de Véry est pénible, elle passe par une piste large, maintenant j’ai mal au pied en montée, je me décide enfin à enlever les gravillons de mes chaussures, … sauf qu’il n’y en a pas ce sont juste des ampoules sous la voute plantaire, elles sont difficiles à supporter en tout cas plus que celles aux talons et aux doigts de pied…

A 1400m des personnes nous encouragent dans la nuit ils ont fait un feu près d’un chalet, je leur demande s’ils font partis de la course, je ne dois pas être très clair car je ne comprends pas leur réponse, je vais confiance à l’altimètre, le col est à 1960m, donc faut encore avancer pour entamer une descente…

Peu après je vois une lampe rattraper le 61 et son pacer qui sont à 300m derrière moi, ça me réveille, le mec cour, je décide de m’y mettre, pas envie de me faire rattraper, peine perdu le mec avance fort, très fort même, il me dit avoir raté le ravito de la Commanderie, il tourne sans boisson depuis le Bolchu… en tout cas il me tire, mais je dois le laisser me distancer, trop rapide et mon écart avec le 61 est suffisante.

Arrivée au Col il y a une croix je lis la plaque « Croix de Fer 1973m », «c’est quoi ce truc ? on passe pas par le Col de Very ? ». Pas le temps de réfléchir le vent est désagréable, reste 20km, ce qui est sûr c’est que j’ai fait 7800m de dénivelé, il ne devrait rester que 1000m. J’entame le début de la descente sans boisson, j’ai tout bu depuis pas mal de temps, rapidement je me rends compte que le terrain est juste horrible, le sentier est défoncé de mottes de terre difformes, de traversées en dévers peu marquées (les avalanches ont arraché le sentier), de zones humides et boueuses difficilement franchissables sans tremper les chaussures, de marches hautes, d’une traversée de névé … bref, ce passage sera un calvaire…

L’avantage de courir la nuit c’est au moins de pouvoir repérer les autres à la frontale, le mec devant est déjà pas mal loin et le 61 et son compagnon pas trop loin derrière.

A un moment j’entends le mec devant gueuler, je comprends pas et avance sur la zone en question, de la boue encore à contourner par la gauche sur de l’herbe, en longeant une clôture qui est électrifiée, ça claque sur mon bras une décharge, qui finie de maudire ce passage !!

Ma vitesse n’est plus une vitesse tellement c’est pénible, impossible de relancer, c’est usant je dois rester vigilant pour ne pas tomber ou me faire une cheville ou simplement me tremper mes pieds. Heureusement un bénévole dans la nuit qui renforce le balisage sur le secteur suite aux remarques des premiers rentre au ravito du Monument, le dernier celui que j’espère atteindre depuis pas mal de temps. Il m’aidera à savoir où poser les pieds dans les traversées en dévers…

J’arrive au ravito vraiment soulagé, on est à 2050m, il ne reste plus beaucoup en dénivelé (600m), je suis bien content de boire, 2h00 sans eau, il est 2h51 je suis 14ème.

Je demande dans quel état est celui qui me précède, le sachant déshydraté, les bénévoles l’ont trouvé frais, en guise de repas il a sorti un sachet de comprimés… moi ce sera pain, banane et soupe.

Je pensais encore possible d’arriver vers 5h, mais les bénévoles m’indiquent qu’il me faudra 3h, le premier ayant mis plus de 2h00, ça m’achève, ok j’ai compris, j’ai un peu d’avance sur le 61 et les suivants ont l’air loin, je décide de dormir 20min histoire de me refaire une santé pour finir ces fameuses 3h00 de course.

Je m’allonge dans une tente, sous un duvet et une couverture, les pieds trempés, je tremble, des frissons, je réalise que je suis limite en hypothermie et que j’ai bien fait de m’arrêter, je ne dors pas vraiment, mais mon corps se repose…pendant ma sieste, j’entends 3 bips m’indiquant 3 concurrents… la course toujours la course, impossible de décrocher.

On me réveille à 3h30, je me lève et allume ma frontale pour aller dans la grande tente où tout le ravito est en place, mais elle s’éteint aussitôt, impossible de l’allumer… je rejoins les autres en râlant sur cette foutue lampe, le pacer du 61 me propose du sparadrap, les bénévoles me rassurent en me disant que c’est un faux contact et non les batteries déchargées comme je le pensais. Les 2 coureurs présents me regardent sans rien dire et filent dans le noir grimper l’Aiguille Croche…

A force de bouger les files dans tous les sens, la lampe semble rester allumée, j’ai alors 2 choix, soit attendre le jour et voir un défilé de coureurs passer, soit rattraper les 2 autres et en cas de panne rester coller à eux jusqu’aux premières lueurs, il est 3h43 (51min d’arrêt), je prends la 2nde option…


Le Monument – St Nicolas de Véroce : 13km – 600md+ (2h59).

Le 61 qui a laché son pacer au ravito, peut être parce que j’étais sous la tente est au milieu de l’ascension de l’aiguille, les 2 autres sont à 5min, la lune est maintenant bien trop haute dans le ciel pour éclairer le sol en cas de défaillance de ma frontale, reste plus qu’à croiser les doigts…

Je rattrape et double les 2 coureurs avant le sommet, 24h de course Je mets pour la 9ème et dernière fois ma bande son de 3h00 et je ne m’en lasse toujours pas…

J’entame la descente de l’Aiguille Croche, quand mon portable s’affole, il capte le réseau à nouveau et je reçois tous les messages qui m’ont été envoyés depuis 18h00, trop content, le terrain est délicat donc je ne peux pas les lire et soudain un gros bip m’annonce la fin de la batterie de mon portable, impossible d’avertir Céline de mon arrivée et mon état… et il ne pourra pas non plus m’éclairer le sol en cas d’arrêt de frontale, …

Les ampoules elles par contre se mettent en éveil j’ai les pieds en feu, la douleur devient terrible, impossible de me relâcher, je suis 15ème le 61 est devant sur la crête, il se retourne de temps en temps, en montée je me rapproche mais pas en descente, ma frontale s’éteint toutes les 2 min, heureusement je peux la rallumer,…

Le terrain sur la crête est sympa, je devine à gauche la falaise qui sert au base-jump et à droite la pente en herbe descend vers les Tappes.

5h j’approche du Mont Joly, je devine sa silhouette, les deux qui me suivent ne décrochent pas et le 61 s’est envolé dans la traversée sous le sommet, bref pas trop de changement, sauf un petit détail, une goutte d’eau, puis 2, puis une bonne rincée, puis le vent, la pluie qui fouette les jambes et le visage, …

Le terrain sous le sommet est composé de dalles et de blocs qui deviennent glissants avec la pluie à 2400m pas moyen de relâcher l’attention, les ampoules explosent tel un feu d’artifices …finir, finir, finir… le cerveau passe en mode : « finisher = douche + lit + habit sec +… ».

Ca fait plus de 24h de course, l’arrivée est pas trop loin et peut être que ça va se calmer, alors je laisse le pantalon de pluie dans le sac, comme les autres d’ailleurs, sauf que la fin se fera entièrement sous la pluie, dernier pointage sous le sommet la tente des bénévoles est arrachée par le vent, ils en bavent pour la tenir et faire le pointage, je les plains, moi ce sont mes ampoules qui me rongent et m’empêchent de rattraper les 2 autres à peine devant moi…

A 2km de l’arrivée un mec seul remonte le parcours sous la pluie toujours, pour encourager les coureurs, incroyable, il était déjà quelque part le samedi ailleurs, mais j’ai oublié où.

Peu importe, je continu en serrant les dents il est 6h30, je me retourne une dernière fois pour être sûr que personne puisse me rattraper et aperçoit un coureur à 300m, l’adrénaline coule à flot ! Pan je me mets à attaquer comme un malade la fin du parcours, 12min à fond en redoutant d’être doublé, sauf qu’il n’y a pas de coureur derrière moi… ça devait être celui qui m’a encouragé (enfin j’espère).

Je franchi la ligne d’arrivée sous la pluie, exténué, demande mon classement, on me félicite et me donne 2 manchons et je fini en marchant retrouver Céline et Tiago qui dorment dans la voiture… il est 6h45, la course est finie.

Voilà comment j’ai parcouru 114km et 8800 ou 9000m de dénivelé en 25h35.


Arrivée + 3 heures…

Pendant ma sieste d’après course, 1 sms de Laurent qui se demande pourquoi je suis classé dans les abandons ? quoi ? illico-presto retour sur le site, on m’explique qu’à Monument pendant ma sieste on m’a enregistré comme ayant abandonné, mais l’erreur est aussitôt corrigée, je suis bien 17ème sur 85 finisher, le dernier met 10h de plus et le premier 7h de moins…

A priori sur 196 partants nous serions environ 65 à avoir fait le grand parcours, 20 auraient été déviés à cause de la pluie sous l’Aiguille Croche car l’itinéraire est trop engagé. Les autres ayant soit abandonnés, soit pris l’option du 60km.

La Montagn’Hard est vraiment une course engagée, technique, physique, longue, de montagne avec une vue magnifique, une organisation composée de bénévoles très accueillants et aux services des coureurs, c’est extra.

6 mois de préparation pour boucler cet ultra, je suis satisfait du boulot accompli et ai du mal à bien réaliser ce qui vient de se passer, en tout cas l’objectif est pleinement atteint !

Merci encore pour vos messages de soutien durant cette course.

Céline et Tiago ont une nouvelle fois joué le rôle d’équipe et de carburant, chaque point de rencontre fût un objectif intermédiaire qui m’a permis de tenir jusqu’à ligne.

  
Maintenant, playa, vagues et repos !



Ps : résultats définitifs le 11 juillet, 196 partants, 85 franchissent la ligne d’arrivée, on est seulement 30 à faire le parcours intégralement, 55 ont pris un raccourci (ne sont pas passé par Aiguille Croche) à cause de la pluie…

Commentaires

Articles les plus consultés